Contre les espèces exotiques envahissantes, la lutte s’organise

Le Vietnam enregistre 19 espèces exotiques envahissantes. Elles ont un impact négatif sur la biodiversité en provoquant le déclin voire l’élimination d’espèces indigènes, menaçant parfois les moyens de subsistance de millions de paysans.

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L’écrevisse de Louisiane est vorace et se nourrit de n’importe quoi, même de détritus.
Photo: CTV/CVN
Photo: CTV/CVN

Ces dernier temps, l’écrevisse de Louisiane (Procambarus clarkii) a été importée illégalement au Vietnam au service de restaurants. Le crustacé est essentiellement vendu sur les réseaux sociaux au prix de 250.000 à 350.000 dôngs/kg.

Selon le Pr.-Dr. Dang Huy Huynh, scientifique de premier rang sur la biodiversité, l’écrevisse de Louisiane est exotique et invasive. Son importation et son élevage sont interdits. Il s’agit d’un crustacé décapode d’eau douce, aux couleurs allant du gris-rouge au rouge vif et pouvant atteindre 20 cm, avec de grandes pinces.

Son refuge naturel est le marécage, mais cette écrevisse s’adapte parfaitement à tous les milieux aquatiques, même pauvres en oxygène (étangs, lacs, marais, rivières, ruisseaux...), et respire sans problème hors de l’eau. Elle est capable de se reproduire dans n’importe quelles conditions, quelle que soit la qualité de l’eau, dans des proportions incroyables (400 à 600 œufs par ponte et plusieurs fois dans l’année). Elle est vorace et se nourrit de n’importe quoi, même de détritus.

Une menace pour la biodiversité

Originaire du Sud-Est des États-Unis, l’écrevisse de Louisiane est désormais reconnue comme une des espèces invasives les plus préoccupantes. Elle est également porteuse d’un champignon qui décime les écrevisses autochtones.

"L’écrevisse de Louisiane menace non seulement la biodiversité mais détruit aussi le riz et les cultures vivrières. Elle pourrait être même porteuse d’une bactérie mortelle pour les autres espèces", alerte le Pr. Huy Huynh.

D’après cet expert, la Sarl Sen Hoàng Giang, implantée dans la province de Dông Thap (delta du Mékong), élève cette espèce depuis 2016. Toutefois, suite aux répercussions néfastes, le Service provincial de l’agriculture et du développement rural lui a demandé de mettre un terme à l’élevage et de la détruire.

Le Docteur Lê Thanh Luu, ancien directeur de l’Institut d’études sur l’aquaculture (ministère de l’Agriculture et du Développement rural), informe pour sa part qu’auparavant, ce crustacé avait été élevé à titre expérimental. C’est ainsi qu’on a pu constater qu’il était nuisible à l’environnement et à l’agriculture du Vietnam. Cette écrevisse est capable de creuser des trous et dévore tout sur son passage: œufs, larves et autres juvéniles de différentes espèces de poissons et d’insectes, sans oublier les herbiers et autres végétations aquatiques. Un véritable désastre qui nécessite d’être rapidement contenu. C’est la raison pour laquelle son élevage a été interdit.

"Crustacé d’eau douce originaire des États-Unis, l’écrevisse de Louisiane est devenue une spécialité. Les Chinois l’importent pour l’élevage avant de la réexporter vers les États-Unis. Récemment, les tensions commerciales États-Unis - Chine pourraient être la cause de la présence de cette espèce au Vietnam", estime le Docteur Lê Thanh Luu.

Malheureusement, l’écrevisse de Louisiane est loin d’être un cas isolé. Introduit au Vietnam en 1986 et élevé à grande échelle en 1992, l’escargot-pomme (Pomacea canaliculata) s’est multiplié à une vitesse phénoménale et a réduit à néant les rizières et cultures vivrières de plusieurs localités. Il s’agit d’un véritable fléau écologique et agricole. Jusqu’à maintenant, des données précises concernant les dégâts causés par ce mollusque demeurent insuffisantes. Pourtant, les sommes déboursées pour la campagne de destruction de cette espèce dans l’ensemble du pays s’élèvent à plusieurs centaines de milliards de dôngs.

Ces dernières années, en dehors de l’escargot-pomme, de nombreuses espèces exotiques enva-hissantes (EEE) comme la tortue à oreilles rouges notamment ont commencé à se multiplier à Hanoï.

Alourdir les sanctions

Destruction des escargots-pommes (Pomacea canaliculata), une espèce exotique envahissante à Thai Binh (Nord).

La gestion des EEE, considérées comme extrêmement dangereuses, fait cependant face actuellement à de nombreuses difficultés. En effet, d’après Lê Trân Nguyên Hùng, chef adjoint du Département de la préservation et du développement des ressources aquatiques (ministère de l’Agriculture et du Développement rural), la coopération dans la gestion et les contrôles entre les organismes compétents restent encore bien en deçà des exigences. Le commerce et le trafic d’animaux exotiques se déroulent essentiellement sur les réseaux sociaux, ce qui rend d’autant plus difficile le travail d’inspection, de contrôle et de traitement.

Selon M. Hùng, une des solutions les plus efficaces consisterait à alourdir les sanctions à des fins dissuasives. Le 18 mai dernier, les garde-frontières de la porte- frontière de Lào Cai (Nord) ont mis la main sur une importation illégale de 75 kg d’écrevisses de Louisiane cachées dans des caisses de jouets. Le trafiquant n’a cependant écopé que d’une amende de 1,5 million de dôngs, un montant dérisoire. C’est pourquoi, il est nécessaire de sanctionner lourdement toutes formes de trafic d’EEE conformément au Code pénal de 2015, qui stipule que "toute personne qui importe ou distribue des espèces exotiques se verra infliger une amende allant de 100 millions à un milliard de dôngs et/ou à une peine d’emprisonnement allant d’un à cinq ans...".

Pourtant, ces sanctions ne sont pas suffisantes, il faut des efforts dans la propagande sur la prévention. Les organismes compétents doivent sensibiliser les habitants et restaurateurs aux impacts destructeurs de l’écrevisse de Louisiane ainsi que des autres EEE sur l’environnement.

Afin de prévenir les effets néfastes des espèces aquati-ques étrangères nuisibles, la participation de toute la société est importante. Notamment, les contrôles douaniers, les évaluations des risques ainsi que la mise en place de règlements de quarantaine doivent être réalisés de façon synchronique afin de limiter au mieux l’entrée des espèces indésirables sur le territoire vietnamien.

Huong Linh/CVN

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