France
Dans le Sud-Ouest, les producteurs de fraises "dépassés" par les fortes chaleurs

"C'est des bonbons qu'on jette par terre" : par plus de 30 degrés, Laurent Dirat, producteur de fraises en Tarn-et-Garonne, contemple, dépité, les fruits répandus au sol, rendus invendables par les fortes chaleurs des dernières semaines.

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Des ouvriers agricoles mettent des fraises en cagette, le 20 mai à Gramont (Tarn-et-Garonne).
Photo : AFP/VNA/CVN

Les températures, largement au-dessus des moyennes de saison, favorisent une maturation deux fois plus rapide qu'en temps normal. Au cours du mois de mai, il a dû jeter la moitié de la récolte. Et les prix chutent.

"On n'arrive pas à suivre, on est dépassé ! Ca fait 12 ans que je fais des fraises, je n'ai jamais vu ça", assure Laurent Dirat face à ses 100.000 fraisiers répartis sur cinq hectares.

La quarantaine de cueilleurs de toutes les nationalités, sur le pied de guerre depuis 07h00, s'active entre les rangs de fraisiers. Il faut trier les fraises pour ne conserver que celles qui n'ont pas encore trop mûri.

"Un épisode caniculaire, c'est le pire, il vaut peut-être mieux qu'il pleuve", se désole Jean-Pascal Mourgues, responsable de la coopérative Mourgues Fruits qui expédie les fraises récoltées dans les champs de Laurent Dirat, à Gramont.

"Crise conjoncturelle"

Habituellement, les cueilleurs passent une fois par semaine dans chaque rang. Pour suivre la cadence de maturation, ils devraient y passer tous les deux jours.

"C'est impossible, donc ça nous contraint à abandonner une partie de la parcelle", explique le Tarn-et-Garonnais qui assure avoir dû jeter "les deux tiers de la récolte sur les quatre derniers jours".

Des ouvriers agricoles cueillent des fraises, le 20 mai à Gramont (Tarn-et-Garonne).
Photo : AFP/VNA/CVN

Xavier Mas, président de l'Association d'organisations de producteurs nationale de fraises, n'hésite pas à parler de "crise conjoncturelle" après près de deux semaines de fortes chaleurs dont les répercussions sur les prix fragilisent la filière.

"Les prix sont 20% plus bas que sur la moyenne des cinq dernières années à la même époque", souligne-t-il.

Le constat est confirmé par Philippe Navarro, posté derrière son stand de fruits et légumes dans le centre de Toulouse, comme tous les jours depuis 35 ans.

"Plus il fait chaud, plus les prix sont élevés car il faut écouler les volumes rapidement", explique ce primeur.

Une offre qui explose et des critères rigides, pour pouvoir en vendre le maximum, qui forcent les producteurs à écarter une bonne partie de la récolte.

"On a eu des retours de clients faisant état de gros problèmes de qualité", explique Jean-Pascal Mourgues dont la société travaille avec une douzaine de producteurs répartis en Tarn-et-Garonne, Lot-et-Garonne et Dordogne.

Les températures "réduisent la taille du fruit, dégradent sa tenue et ont un impact sur la qualité", décrit Xavier Mas.

Pour lutter et ralentir la maturation, les cultivateurs arrosent plus qu'à l'accoutumée. "On met de l'eau, sinon les pieds claquent", image M. Mourgues, dont la coopérative est basée à Moissac depuis 1948.

L'exigence des supermarchés

Des barquettes de fraises sur un marché de Toulouse, le 20 mai.
Photo : AFP/VNA/CVN

Les rangs, rendus boueux par l'indispensable irrigation, sont arpentés par une main d'œuvre plus que précieuse en de telles circonstances.

"On prévoit des salariés en fonction de la production théorique mais pas pour une canicule en plein mois de mai", se plaint Xavier Mas.

À Gramont, tout près du Gers, une vingtaine d'Andalous côtoient des Malgaches, des Maliens, des Tunisiens ou encore des Marocains sur la propriété de M. Dirat.

Sous un soleil de plomb, ces salariés, dont certains sont arrivés de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), à 150 km de là, le matin même, ne ramassent que les fraises correspondant aux canons de la grande distribution.

"L'exigence est d'avoir un produit très solide pour les supermarchés, il leur faut un degré de maturité très faible, au risque d'avoir une fraise insipide, mais les supermarchés n'auront pas de perte", développe Laurent Dirat.

"Et pour ça, regrette-t-il, la condition, c'est de jeter des fraises comme on le fait".

AFP/VNA/CVN

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