De l’amitié à l’amour (suite et fin)

Une belle amitié transformée en tendre amour ou des études pour obtenir diplômes et prospérité ? Nguyên Ky devait choisir entre les deux, remettant ses sentiments entre les mains du destin.

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Une scène reconstituée d’un lettré dans sa cahute en bambou participant à un concours de doctorat.
Photo : Anh Thao/CVN

Nous avions laissé Nguyên Ky fraîchement promu au concours triennal. Alors, son père pensa qu’il était temps pour lui de se marier et lui proposa une jeune fille qui appartenait à une excellente famille.

Nguyên Ky s’efforça de s’y soustraire, puis se décida à parler de sa bien-aimée, affirmant qu’il préférait mourir plutôt que de tromper son attente. Mais il s’expliqua si maladroitement que son père se méfia, persuadé que c’était seulement une aventure banale et qu’il oublierait vite une femme de cette condition. Il crut donc bien faire en s’opposant nettement au désir de son fils, et déclara qu’il ne recevrait jamais une chanteuse sous son toit.

Tristes retrouvailles

Naturellement, Nguyên Ky en souffrit beaucoup : son amour et son estime pour la jeune fille étaient intacts. Il sentait surtout qu’il ne devait pas l’abandonner, bien qu’aucun serment n’eût été échangé entre eux. Mais ces considérations ne lui firent pas oublier qu’il subsiste pour un homme d’autres devoirs, moins doux peut-être, mais plus impérieux auxquels un lettré moins qu’un autre ne saurait se dérober. Et il obéit à son père. L’année suivante, il se rendit à la capitale pour les concours de doctorat.

La jeune fille sut l’y retrouver, lui apportant des présents de toute sorte. S’apercevant de sa gêne, elle devina et dit : "Je vois, vous n’avez pas besoin de parler... Au fond, c’est la destinée : chacun d’entre nous a son chemin tracé, dans des mondes différents...". Et elle lui fit ses adieux pour toujours. Cette année-là, Nguyên Ky fut reçu docteur, nommé mandarin au cabinet impérial, puis désigné pour une ambassade en Chine. À son retour, il exerça pendant dix ans les plus hautes fonctions en province et à la capitale. Survinrent ensuite les troubles de Hai Duong (Nord), suscités par un agitateur. Envoyé contre lui, Nguyên Ky pacifia la région et obtint, à la suite de ces services, le titre de duc.

Douce attention

Il avait alors atteint le sommet de sa carrière. Richesses, honneurs, famille nombreuse, il n’avait plus rien à désirer. Seulement, chaque fois qu’au milieu de ses amis, il était fait allusion à sa jeunesse difficile, devenait submergé par l’émotion et s’adressait à lui-même de secrets reproches. Plusieurs fois, il chargea des hommes de confiance de rechercher les traces de la chanteuse, toujours en vain.

Peinture du cortège accompagnant autrefois le retour glorieux du lauréat du concours de doctorat du palais royal dans son village natal.
Photo : CTV/CVN

Un soir, au cours d’un festin chez le marquis Dang, notre ministre remarqua, parmi les musiciens et les chanteuses assis en bas, une femme avec des castagnettes, dont les traits lui rappelaient étrangement un visage connu. Il s’informa : c’était en effet l’amie qui l’avait obligé autrefois. Bien que sa beauté fût déjà nuancée par la poussière et le vent, la voix et les gestes n’avaient rien perdu de leur charme et de leur fraîcheur.

De sa place, Nguyên Ky crut assister à une apparition de sa jeunesse. Il apprit d’elle que dix ans auparavant, elle avait épousé un soldat originaire de Thai Nguyên (Nord). Devenue veuve, elle ne s’était pas remariée. Elle avait quelques économies qui lui permettaient d’entretenir sa mère. Malheureusement, un jeune frère indigne les avait dilapidées entièrement, si bien qu’elle avait été obligée d’emmener sa mère avec elle à la capitale pour tâcher de gagner leur bol de riz quotidien.

Vivement ému, Nguyên Ky les invita à venir habiter chez lui. Elle accepta, pensant à sa mère. Il mit à leur disposition une maison à part, et ne les laissa manquer de rien. Un peu plus d’un an après, la vieille femme mourut. Nguyên Ky lui fit de dignes funérailles. Quand tout fut fini, son ancienne amie vint le remercier et lui demanda la permission de s’éloigner.

Ne réussissant pas à la retenir, il la pria d’accepter au moins quelque argent : elle refusa. Il voulut lui dire quelques mots sur leur passé, mais c’était difficile, il hésita... et la vit s’en aller. Sans avoir pu lui parler, il sentit au cœur une tristesse comme il n’en avait plus éprouvé depuis longtemps.

Parfois, respect et réserve empêchent de nobles sentiments de s’exprimer.


Ông Ngoai/CVN

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